- Source
- BEN URD
- Date
- 31 mars 2016
**Déclaration du Collectif des partis politiques de l’Opposition Démocratique et Républicaine sur le projet de Loi modifiant le Code des Collectivités territoriales**
Monsieur le chef de file, Messieurs les Présidents des partis, Mesdames,
Messieurs les journalistes, Chers invités,
1\. Le Gouvernement a déposé sur le bureau de l’Assemblée Nationale un projet
de loi portant modification de la loi N°2012-007 du 07 février 2012 portant
Code des collectivités territoriales modifiée par la loi N°2014-052 du 14
octobre 2014.
2\. La Conférence des présidents du Collectif des partis politiques de
l’opposition démocratique et républicaine, réunie le 28 mars 2016 au siège du
PS Yelen Kura, a considéré que l’objet dudit projet est triple:
\- substituer une autorité intérimaire à la délégation spéciale appelée par le
Code actuel à remplir certaines fonctions du conseil communal, du conseil de
cercle ou du conseil régional en cas de dissolution ou de démission de tous
leurs membres ou en cas d’annulation devenue définitive de l’élection de tous
leurs membres ou lorsque lesdits conseils ne peut être constitués;
\- faire exercer par ces autorités intérimaires toutes les fonctions dévolues
aux conseils communaux et aux conseils de cercle et de région;
\- renvoyer à un décret pris en Conseil des ministres la détermination des
modalités de mise en place des autorités intérimaires, y compris les
dispositions spécifiques relatives aux collectivités du Nord.
3\. La Conférence des présidents s’est aperçue, à la lecture de la lettre de
dépôt, qu’il est prévu par le projet de décret que dans les régions de Gao,
Tombouctou, Kidal, Ménaka et Taoudénit :
\- les membres de ces autorités intérimaires seront désignés par le
Gouvernement, les groupes armés (la Coordination des Mouvements de l’Azawad et
la Plateforme) et les autorités traditionnelles;
\- les autorités intérimaires seront constituées d’agents des services
déconcentrés de l’État, de représentants de la CMA et de la Plateforme, de la
société civile et d’anciens membres des conseils qu’elles vont remplacer.
. La Conférence des présidents du Collectif des partis politiques de
l’opposition démocratique et républicaine est arrivée aux conclusions
suivantes
.4.1. Si le projet était voté, la loi constituerait un recul démocratique
parce que :
\- elle va conduire à substituer des organes désignés par l’Administration aux
conseils communaux, conseils de cercle, conseils régionaux et au conseil du
District élus et dont les mandats ont été prorogés par la loi N°2015-047 du 7
décembre 2015jusqu’à la mise en place de nouveaux organes ;
\- elle va marginaliser les partis politiques dans la gestion des
collectivités en ce que les autorités intérimaires seront constituées de
personnes provenant des services déconcentrés, de la société civile et du
secteur privé ainsi que de conseillers sortants; ces derniers étant les seuls
membres de l’équipe représentant des partis politiques.
4.2. Si le projet était voté, la loi consacrerait une violation flagrante de
la Constitution et des lois que le Gouvernement se doit de respecter :
\- la lettre de dépôt n’indique pas que le Haut Conseil des Collectivités a
donné son avis sur le projet de loi en application de l’article 90 de la
Constitution qui impose au Gouvernement de saisir pour avis cette institution
pour toutes actions concernant la politique de développement local et
régional;
\- l’article 2 du projet renvoie la détermination des modalités de mise en
place des autorités intérimaires, y compris les dispositions spécifiques
relatives aux collectivités du Nord, à un décret pris en Conseil des ministres
alors qu’au regard de l’article 70 de la Constitution, jusque-là de telles
dispositions ressortent du domaine de la loi comme l’illustre suffisamment le
code des collectivités; sauf mise en œuvre de l’alinéa 3 de l’article 73 de la
Constitution.
4.3. Si le projet était voté, cette loi serait un pas de plus vers la
partition du pays en instituant en matière d’administration et de gestion des
collectivités, deux régimes juridiques distincts; l’un s’appliquant au reste
du territoire national et qui resterait dans le domaine de la loi et l’autre,
celui qui est prévu par l’article 2, relevant du domaine règlementaire et ne
concernant que les régions de Gao, Tombouctou, Kidal, Ménaka et Taoudénit
appelées Azawad par certains.
4.4. Si le projet était voté, la loi ouvrirait, en matière de gestion et
d’administration du territoire, la voie à un partage de l’exercice du pouvoir
souverain entre les autorités habilitées par la Constitution (le Président de
la République, l’Assemblée nationale et le gouvernement) et d’autres qui n’ont
point cette qualité, c’est-à-dire les groupes armés, puisque les autorités
intérimaires dans les régions de Gao, Tombouctou, Kidal, Ménaka et Taoudénit
seraient désignées par le gouvernement, la Coordination, la Plateforme et les
autorités traditionnelles.
4.5. En outre, dans le projet de loi introduit par le Gouvernement, la
légitimité des urnes est supplantée par la raison du plus fort, celle des
armes dont se prévalent les groupes armés.
Il met en évidence le manque criard de concertations qui auraient permis
d’améliorer l’Accord d’Alger en vue de faciliter sa mise en œuvre. La surdité,
la cécité et le refus constant de concertations du gouvernement sont de
réelles menaces pour la paix et la stabilité du pays.
Nous recommandons l’abandon de ce projet de loi et invitons le gouvernement à
des discussions avec la majorité et l’opposition afin de trouver un compromis
acceptable pour tous.
Nous réitérons notre appel à la tenue de concertations sur l’Accord pour la
paix et la réconciliation nationale et prenons à témoin l’opinion publique
nationale et la communauté internationale sur le manque de volonté politique
du président de la République et du gouvernement et leur refus obstiné
d’entendre les propositions de l’opposition républicaine.
5\. La Conférence des Présidents du Collectif des partis politiques de
l’opposition démocratique et républicaine, au regard de ces considérations, a
invité le Groupe Parlementaire Vigilance Républicaine et Démocratique (VRD) à
ne pas voter ce projet de loi.
Bamako, le 30 mars 2016