- Source
- Facebook, Soumaila CIssé
- Date
- 29 août 2014
Je remercie le Gouvernement pour la diligence avec laquelle le présent
collectif a été présenté à l’Assemblée nationale au regard de la situation
difficile que notre pays traverse au plan économique, financier, social et
sécuritaire.
Toutefois, ce collectif, malgré les ajustements opérés par le Gouvernement,
renferme de notre point de vue certaines insuffisances qui méritent d’être
soulignées. Celles-ci sont reflétées principalement au niveau des hypothèses
retenues pour la modification du budget initial. Elles touchent également la
traçabilité de certaines inscriptions budgétaires, la sincérité des prévisions
de recettes et l’exhaustivité des prévisions de dépenses. Bref, le collectif
est insuffisant également quant à l’équilibre budgétaire notamment la
soutenabilité du déficit global.
Concernant les hypothèses retenues,
Le Gouvernement a opté pour :
\- La réduction des recettes des Impôts et des Domaines et de l’augmentation
des recettes des Douanes ;
\- La prise en compte des dépenses liées à l’avion, le renforcement de
certains postes de dépenses et la diminution d’autres postes ;
\- La prise en compte des conventions signées entrainant une forte
budgétisation au niveau des appuis budgétaires malgré le contexte de
suspension en cours de la coopération avec certains bailleurs de fonds ;
\- La forte aggravation du déficit budgétaire.
Concernant la question de la non traçabilité de certaines inscriptions, il y a
lieu de prendre trois (03) cas qui sont assez édifiants.
\- La subvention EDM de 50 milliards est inscrite pour 35 milliards au niveau
des charges communes et 15 milliards au niveau du Ministère de l’Énergie ;
\- L’avion selon le gouvernement a connu déjà une exécution de 5,5 milliards
FCFA. Dans ce cas faire ressortir le complément de 14,5 milliards dans les
mesures nouvelles ne parait nullement logique. L’inscription devait servir à
renforcer la rubrique qui a supporté les 5,5 milliards de FCFA ;
\- De nouvelles inscriptions dont 4 ,2milliards sont prévues au niveau des
charges communes pour notamment l’armée et la présidence. Or à la lecture du
collectif on ne note aucune augmentation de crédits de la présidence.
En gros, le renforcement des crédits des charges communes qui passent à plus
de 460 milliards est de nature à affecter la transparence budgétaire. Il
convenait d’imputer directement les crédits des départements et institutions
concernés dans leur budget. Concernant la sincérité des provisions
budgétaires, l’augmentation des recettes douanières ne se justifie pas au
regard de la conjoncture économique actuelle. Il en est de même de
l’augmentation forte des appuis budgétaires et du financement extérieur du
Budget Spécial d’Investissement « BSI » plus de 550 milliards de FCFA. La
prudence n’a pas été observée quand on sait que nos finances publiques 2014
souffrent de la suspension de la coopération des bailleurs de fonds, du niveau
faible d’exécution du BSI initial (00,32% au 30 juin 2014), des appuis
budgétaires (02,26% au 30 juin 2014). Dans ces conditions ces renforcements
pour être exécutés au maximum au courant du 4ème trimestre relèvent de la non
observation de la prudence qui sied en la matière.
Quand aux dépenses, elles ont été renforcées malgré la diminution d’environ 70
milliards des ressources internes. Mieux, le collectif ne fait apparaitre
aucune inscription concernant le protocole relatif à l’équipement de l’armée
de 69 milliards pour lequel 17 milliards au plus et 5 milliards au moins sont
à mobiliser pour 2014 et cela contrairement aux dispositions de ce protocole
qui prévoit respectivement le paiement de 50% en 2015 et 2016. Dans le même
ordre d’idée la garantie financière initiée par le gouvernement est contraire
aux dispositions du protocole.
Concernant l’équilibre budgétaire le triplement du déficit budgétaire initial
est de nature à aggraver la situation de trésorerie de l’État. En effet, déjà
l’encours de l’État vis-à-vis des banques commerciales est passé en une année
de 128 milliards à 205 milliards au 31 mars 2014. Au surplus il reste encore à
régler plus de 120 milliards au titre des dettes, car sur 157 milliards
seulement 18,11% sont exécutés au 30 juin 2014. Enfin, les instances de
paiement concernant les fournisseurs locaux seront accrues.
En conclusion, le présent collectif parait en l’état très expansionniste or la
logique dans le contexte économique et financier actuel milite fortement à la
prudence absolue. Le niveau du déficit issu du collectif causera certainement
plus de dommages à l’économie. Ce déficit entrainera une dégradation de la
trésorerie de l’État en raison de son financement hypothétique lié au contexte
actuel auprès du marché sous régional et la mobilisation de l’épargne
nationale durement affectée par la crise, à l’absence de toute aide budgétaire
qui a toujours constitué son financement principal et surtout le recours en
partie aux bons du trésor à hauteur de plus de 60 milliards pour financer les
renforcements des crédits du Budget Spécial d’Investissement « BSI »
financement intérieur.
De tout ce qui précède, il sied de conclure que le collectif budgétaire 2014
est peu réaliste dans son approche politique. Il est non pertinent quant à la
soutenabilité de son déficit et surtout entrainera une éviction certaine au
détriment du secteur réel, du secteur monétaire et du secteur des échanges.
Par ailleurs, les futurs budgets doivent, dans le cadre de la lisibilité et la
traçabilité budgétaire, revoir les inscriptions au niveau des charges communes
qui représentent aujourd’hui 42% des ressources internes et 51% des recettes
fiscales.
Bamako, le 25 août 2014
Le Président du Groupe
Mody N’DIAYE